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La traduction dans Google Maps: Québec vs. France

Dialogue entre un Québécois et un Français: « Quand j'étais flo, j'ai porté des broches parce que j'avais les dents toutes croches. » Réponse du Français: « C'est drôle, mais j'ai juste compris le mot dent. »
Parfois, il faut savoir traduire entre le Québec et la France. (Source)

Dans mon article sur comment traduire un profil Google, j’ai mentionné que les traductions de Google ne sont pas toujours idéales. Dans cet article en deux parties, je vais discuter des traductions qui laissent fortement à désirer dans la version en français canadien de Google Maps.

Il faut savoir qu’au moment de définir sa liste de catégories d’entreprises, Google n’a pas demandé l’avis des commerçants et des entreprises québécoises, pas plus que lorsque est venu le moment de traduire le tout. Google s’est basé sur le système de Google Translate, qui tend à contenir du matériel européen. Si vous avez vous-même un peu voyagé, que ce soit aux États-Unis ou ailleurs, vous avez surement vécu ce phénomène: on vous dira «Ha! You are French!» et vous répondrez «No! I’m Canadian!». Pour l’avoir vécu à plusieurs reprises moi-même, je vous confirme que lorsque ailleurs nous parlons français et affirmons être aussi Canadien, les gens ne cache pas leur confusion.

Noms de catégorie différents en France.

Ce problème se présente dans deux variantes. Soit une expression européenne est imposée au Québec, soit le nom est différent, mais le nom français apparaît parfois sans explication pour les utilisateurs québécois.

Dans la première catégorie, signalons les cas de «lycée pour garçons» et «lycée pour filles» (anglais: Girls’/Boys’ high school). De manière générale, peu de catégorie d’entreprises se voit imposer un terme trop Européen. On rencontre plus souvent des catégories inexistantes, mal traduites, ou pas encore disponibles en français.

Dans la seconde catégorie, les principaux exemples que nous avons eu l’occasion de rencontrer concernent les physiothérapeutes et les podiatres. Dans les deux cas, ces variations causent de sérieux problèmes. En France (incluant dans Google Maps) les physiothérapeutes (anglais: physiotherapist) sont connus sous le terme de «kinésithérapeutes». Or ce terme n’est pas du tout approprié au Québec, où il désigne plutôt une formation non professionnelle et non réglementée souvent pratiquée par des massothérapeutes. Le problème est similaire dans le cas des podiatres (anglais: podiatrist), cette spécialité médicale n’existant pas en France. La catégorie y est désignée sous le terme «podologue», or ce terme et la profession qu’il désigne en France (comme au Québec d’ailleurs, mais le terme est moins commun ici) correspondent presque parfaitement à la catégorie foot care («soins des pieds») de Google Maps! La principale différence est qu’en France, le podologue a aussi compétence pour prescrire et fabriquer des orthèses pour les pieds,

On comprendra donc que personne au Québec ne souhaite voir apparaître le label européen, comme c’est le cas ici:

Une partie du profil d'entreprise d'une clinique de physiothérapie située à Boisbriand avec la catégorie « kinésithérapeute » surlignée en jaune.
Oh noooooon…

Malheureusement, il arrive parfois et inexplicablement que Google montre des catégories européenne au Québec même si l’utilisateur a bien réglé sa langue sur «Français (Canada)». Comme cet affichage dépend non des réglages du propriétaire, mais bien de l’utilisateur et que ce problème est irrégulier, il n’y a pas de solutions connues.

Un rare cas où nous aimerions bien bénéficier de la catégorie française concerne les arboriculteurs. Ces spécialistes de l’élagage et de l’émondage utilisent en anglais la catégorie tree service, traduite par «Service d’entretien d’arbres» pour le Québec. Cet anglicisme est toutefois rare ici, et nous préférerions de loin pouvoir employer la traduction que Google utilise en France: «Service d’élagage»!

Traduction douteuse au Québec comme en France

La pire traduction de nom de catégorie actuellement en place dans Google Maps est (à ma connaissance) la catégorie appelée en français Service de réparation de pare-brise. Comme c’est un type d’entreprise légitime, on ne s’en rendrait pas compte si ce n’était de l’étrange sélection de services:

La sélection inclue "problèmes de batterie", "réparation de caméra et d'appareils photo", "réparation rempalcement d'écrans" et "réparation d'enceintes"
Voilà de bien étranges choses à faire sur un pare-brise d’automobile…

Je ne sais pas pour vous, mais je n’ai jamais entendu parler d’un pare-brise endommagé par un dégât d’eau! En fait, ce nom est la traduction mal ficelée de l’anglais Screen repair service, C’est à dire un Service de réparation d’écrans… La catégorie appropriée est en fait Atelier de vitres d’auto.

Une catégorie dont le nom est source constante d’irritation est celle pour les notaires. En effet, le concept de notaire, soit un avocat spécialiste du droit privé qui ne peut plaider ni déposer de document au tribunal, n’existe pas en droit américain (à l’exception de la Louisiane). Dans les pays anglo-saxon, c’est à des avocats membres du barreau que l’on s’adressera, le notary public anglo-saxon n’ayant guère d’autres attributions que d’authentifier des documents ou des déclarations sous serment. Google a, décision très malheureuse, choisi de ne pas distinguer ces professions. Nous aboutissons donc à la malheureuse désignation «Notaires et notaires publics» en français, alors qu’en anglais, le terme demeure Notary public

En denturologie, on frappe encore un mur. Cette catégorie est appelée en anglais denture care center et a été traduite de la pire manière possible par «centre de prothèses dentaires». Ce terme n’est approprié ni au Québec ni en France. En effet, outre-Atlantique le professionnel est appelé «prothésiste dentaire»et il pratique généralement dans un «laboratoire de prothèses dentaires». Au Québec, on parle bien sûr du denturologiste ou (plus rarement) denturologue.

Enfin, nous mentionnerons le cas des spécialistes du tirage de joints et de la finition intérieure. En effet, la catégorie imposée par Google est «Entrepreneur spécialisé en cloisons sèches» (Dry wall contractor), voire «plâtrier» (Plasterer), or le terme «cloison sèche» bien que techniquement correct, est très peu en usage au Québec. Il n’est même pas particulièrement utilisé en France non plus: on y parle plutôt de «plaques de plâtre«. C’est d’ailleurs ce terme qui est employé pour traduire le mot drywall dans les services:

Une partie de la liste de services pour la catégorie d'entrepreneur spécialisé en cloisons sèches. Les services « pose de plaques de plâtre » et « réparation de plaque de plâtre » sont marqués en rouge.

Deux exemples de traductions très mauvaises ont depuis été changées. Le premier concerne les courtiers en valeurs mobilières (anglais: stock brocker). En effet, Google a traduit durant plusieurs années ce titre par le terme «courtier immobilier»! Il y a environs cinq ans, ce grave problème a été corrigé, mais certains courtiers immobiliers qui n’ont jamais fait la correction continuent de montrer cette catégorie désormais erronée:

Capture d'écran de Google Maps montrant une partie du profil de « Chantale Provost, Courtier Immobilier » dont la catégorie affichée est « courtier en valeurs mobilières ».
Un exemple

De même, la catégorie aujourd’hui appelée «massothérapeute» (massage therapist en anglais) s’est originellement intitulée uniquement «masseur», ce qui fut source de problèmes autant au Québec, où le terme est associé aux massages érotiques, qu’en France où le titre de masso- ou masseur-kinésithérapeute (quoique de nos jours on tende à n’utiliser que «kinésithérapeute») correspond à notre physiothérapeute.

Dans mon prochain article, je m’intéresserai à des problèmes moins spécifiques au français canadien. Suivez ce blogue pour continuer à avoir des informations sur les profils d’entreprise Google!